LA PARTAGE DE DONNÉES : UNE ÉTUDE QUANTITATIVE DE L’ÉCHANGE DE VALEUR. QUAND ET SOUS QUELLES CONDITIONS LES CONSOMMATEURS SONT-ILS PRÊTS À PARTAGER LEURS DONNÉES ZERO-PARTY EN ÉCHANGE D’UNE EXPÉRIENCE DE MARQUE PERSONNALISÉE ?

Dans un monde digital toujours actif et omniprésent où le partage de données est roi, et où les marques qui maîtrisent et exploitent le pouvoir de leurs données arrivent en tête, les consommateurs sont de plus en plus conscients de la manière dont leurs données personnelles sont utilisées et stockées et le terme « échange de valeur » est devenu un sujet très discuté. 

Au cours de la dernière décennie, cette tendance dans le comportement des consommateurs a entraîné des changements importants dans le paysage juridique, avec l’entrée en vigueur, à des degrés divers, de lois et de réglementations sur la protection des données, telles que le RGPD (règlement général sur la protection des données) en Europe et le CCPA (California Consumer Protection Act) en Californie.

Ces dernières années, les déclarations sur la confidentialité des données et les raisons pour lesquelles les consommateurs partagent leurs données ont été surtout théoriques. Nous nous sommes donc associés à Elisa Kalantarian, une ancienne étudiante de l’ULB et de la Solvay Business School of Economics & Management travaillant actuellement chez Amazon, qui a mené une étude auprès de 301 participants et a rédigé sa thèse en juin 2021 sur le sujet, intitulée

« Sous quelles conditions les consommateurs sont-ils prêts à partager leurs données personnelles pour bénéficier de la personnalisation? »

Dans cet article, nous allons examiner de plus près les conclusions de l’enquête et de la thèse d’Elisa, afin de comprendre les facteurs qui entrent en jeu lorsque les consommateurs envisagent de partager leurs données avec une marque. 

Quelles données sont-ils prêts à partager et qu’attendent-ils en retour ?

L’échange de valeur lors du partage de données : qu’en dit la théorie ?

Le monde numérique est de plus en plus présent dans notre quotidien, et les consommateurs passent de plus en plus de temps sur internet, les marques capitalisent donc sur ce phénomène en monétisant leur audience. Mais dans un paysage digital où les cookies tiers sont en voie de disparition, les marques et les groupes de médias doivent chercher des nouvelles stratégies innovantes pour collecter les données de leurs utilisateurs afin de leur offrir une expérience de marque améliorée et plus personnalisée.  

Advertising Weekly définit l’échange de valeur comme :

une transaction entre deux parties qui fait que chaque partie reçoit quelque chose de valeur, une sorte de bénéfice, de la transaction.

Les consommateurs sont plus enclins à faire quelque chose s’ils sentent qu’il y a un avantage pour eux. Il est donc essentiel que les marques et les groupes de médias établissent leurs stratégies de marketing de manière à démontrer la valeur du partage de données de leur public

Dans le cas d’un groupe de médias ou d’un éditeur, cet échange de valeur est établi en fournissant des informations et un contenu dignes de confiance, de haute qualité et fiables, associés à une expérience de marque impeccable. Et c’est ainsi qu’ils rempliront leur moitié de l’échange. Encourageant ainsi le lecteur à partager ses données personnelles, en échange de ce que l’éditeur a à offrir.

En ce qui concerne les marques, leur moitié de l’échange de valeur consiste à offrir à leur public une expérience de marque qui les place au centre de leurs actions, et qui est fondée sur la confiance et une relation significative.

Dans le monde sans cookies qui s’annonce, les données ont été décrites par beaucoup comme le ‘nouveau pétrole‘. Pour les marques, il est donc essentiel de donner un sens à cette mine d’or et d’exploiter le pouvoir des données qu’elles ont recueillies. Gardant à l’esprit le fait que les données clients n’ont de valeur et ne sont rentables que lorsqu’elles sont utilisables, les marques doivent utiliser les données qu’elles possèdent afin d’offrir à leur public une expérience personnalisée afin d’accroître leur fidélité et, par conséquent, augmenter leurs bénéfices financiers.

Curieux d’en savoir plus sur la fin des cookies tiers ? Nous avons parlé à un large panel d’experts pour connaître leur avis sur le monde sans cookies. Lisez l’article.

Mais le personnage central dans tout cela ne peut être oublié et doit être placé au premier plan de toute stratégie de collecte de données : le consommateur. Ils sont de plus en plus conscients de ce qu’il advient des données personnelles qu’ils partagent et l’étude d’Elisa tente de comprendre leur motivation à partager des données. Elle a posé à 301 participants une série de questions pour savoir dans quelles conditions ils se sentent prêts à partager leurs données personnelles. 

Un calcul commun utilisé par les consommateurs pour peser le pour et le contre du partage de données, appelé « calcul de confidentialité« , peut aider les marques à comprendre le comportement de leurs clients. Elisa a également pris en compte d’autres facteurs dans son étude : 

  • 🫧 la transparence de la manière dont les données sont traitées par une entreprise
  • 🛑 le contrôle que les consommateurs ont sur leurs données
  • 🫶 la fiabilité d’une entreprise 
  • 🎛️ le type de données que l’on demande au consommateur de partager.

La principale conclusion de cette étude est que les consommateurs réagissent différemment au partage de données, selon le type d’informations qu’on leur demande de partager, et qu’un sentiment de contrôle signifie qu’ils sont plus disposés à partager leurs informations, quel que soit le type de données collectées.

L’étude d’Elisa met également en évidence 2 autres conclusions :

  • 🤔 Cette étude peut aider les marques à comprendre ce à quoi elles doivent faire attention et ce qu’elles doivent éviter face aux clients qui partagent leurs données. Les entreprises doivent construire une relation forte avec leur public, qui les incitera à partager leurs données personnelles.
  • 💡 L’étude d’Elisa met également en garde les décideurs politiques contre les lacunes du cadre juridique, et les problèmes que rencontrent encore les consommateurs en Europe pour comprendre le RGPD.

Les données ne consistent pas à en rajouter dans votre assiette. Il s’agit de s’assurer que vous avez les bonnes choses dans votre assiette. – Paul Fleming, Education Scotland

La valeur du partage de données : que disent les données ?

Elisa a basé son étude sur les 3 hypothèses suivantes, avec les résultats suivants :

  1. Le calcul de la confidentialité a un effet direct sur l’intention du consommateur de partager ses données et cet effet serait modéré par le contrôle accordé au consommateur.
  • ✅ CONFIRMÉ : les avantages perçus ont un effet direct sur l’intention du consommateur de partager des données.
  • ✅ CONFIRMÉ : les risques perçus ont un effet direct sur l’intention du consommateur de partager des données.
  • ✅ CONFIRMÉ : le contrôle accordé au consommateur modère l’effet des avantages perçus sur l’intention du consommateur de partager des données.
  • ❌ NON CONFIRMÉ : le contrôle accordé au consommateur modère l’effet des risques perçus sur l’intention du consommateur de partager des données.
  1. La volonté du consommateur de partager des données personnelles est influencée par la confiance, le contrôle et la transparence.
  • ✅ CONFIRMÉ : le contrôle accordé au consommateur modère l’effet de la transparence dans l’utilisation des données sur l’intention du consommateur de partager ses données.
  • ✅ CONFIRMÉ : les avantages perçus seront les médiateurs de l’effet de la transparence dans l’utilisation des données sur l’intention du consommateur de partager des données.
  • ❌ La confiance modère la relation en 2.b
  1. Selon le type de données demandées aux consommateurs et le contrôle qui leur est donné, l’intention de partager les données sera plus ou moins importante.
  • ❌ NON CONFIRMÉ : le type de données influencera les relations entre le calcul de la confidentialité et l’intention de partager les données.
  • ✅ CONFIRMÉ : la combinaison des contrôles accordés et du type de données requises influencera l’intention de partager les données.

Quelques exemples d’échange de valeur chez les clients de Qualifio

L’Oréal

L’Oréal, la première marque de cosmétiques au monde, a récemment lancé son projet de « requalification de la base de données » dans le but de mettre à jour et enrichir ses données clients. Ils constituent également des « profils de beauté » pour leurs clients, basés sur les données collectées (type de peau, type de cheveux, préférences, …) afin de segmenter leur base de données et d’envoyer des messages produits et marketing pertinents à leurs clients. 

Leur « projet de requalification des données » fonctionne en 3 étapes :

  • 📮 Le client reçoit un e-mail.
  • 📃 Il est redirigé vers un formulaire avec des champs spécifiques, pour rassembler les informations manquantes et compléter son profil.
  • ⏫ Ces données sont ensuite immédiatement partagées et mises à jour dans le CRM de L’Oréal.

Purina

Purina, la marque d’aliments pour animaux domestiques de Nestlé, a mis en place une série de campagnes interactives pour promouvoir ses bâtonnets à mâcher pour chiens Dentastix. Ces actions leur ont permis de collecter de précieuses données de type « zero-party » auprès de leurs consommateurs, comme le nom du chien, sa date de naissance et sa race. Ils ont ensuite pu exploiter ces données et améliorer l’expérience des consommateurs auprès de la marque, en personnalisant leur message par exemple (ils ont remarqué une augmentation de 10 % du taux d’ouverture des e-mails lorsque le nom du chien figurait dans l’objet) et en transmettant le bon message à leur public.  

dentastix

Currys PC  

Lorsque la pandémie de COVID-19 a paralysé le monde en mars 2020, le détaillant britannique de produits électroniques, Currys PC, a lancé un test de personnalité pour aider son public à trouver les accessoires de bureau à domicile idéaux. Currys a inclus la possibilité de s’inscrire à leur newsletter dans le formulaire de cette campagne, ce qui leur permet d’envoyer des offres personnalisées et des recommandations de produits à ceux qui ont participé à la campagne. Ils ont également inclus un bouton d’achat à la fin du test qui permet à leurs utilisateurs d’acheter immédiatement le produit recommandé en ligne. 

Decathlon

decathlon

À l’approche de Noël, le détaillant belge d’équipements sportifs, Décathlon, a utilisé Qualifio Engage pour mettre en place une campagne de guide du cadeau idéal qui a aidé son public à choisir un cadeau pour ses proches, ou pour lui-même ! Basée sur un test de personnalité, cette campagne leur a permis d’atteindre plusieurs objectifs : ils ont collecté de précieuses données de préférence auprès de leur public, ce qui leur a permis de personnaliser leurs messages, ils ont amélioré l’expérience de leur public avec la marque en leur offrant un moment amusant et engageant avec un résultat utile, et ils ont dirigé les utilisateurs vers leur boutique en ligne.

Nespresso 

La simplicité est parfois le meilleur moyen d’avancer ! Nespresso l’a prouvé en utilisant un simple formulaire pour leur campagne « Gifting Friday » à l’occasion du Black Friday. Ils ont invité les acheteurs à remplir un formulaire pour recevoir à l’avance leurs offres exclusives du Gifting Friday. Une campagne simple et rapide pour attirer des prospects intéressants et intéressés. 

nespresso

Valencia CF 

Le club de football espagnol, Valencia CF, utilise Qualifio Engage afin d’obtenir du feedback perspicace et pertinent de leur public. Ils postent régulièrement des batailles de produits sur leurs canaux pour collecter des données zero-party, recueillir des commentaires et découvrir ce que leurs fans préfèrent. Le concept est simple : les fans doivent choisir entre deux produits de leur collection, le maillot extérieur ou le maillot d’entraînement par exemple, et ils ont une chance de gagner l’un des deux. Toutes les données recueillies lors de ces batailles sont ensuite envoyées au responsable du commerce électronique. Grâce à ces données, le club connaît les préférences des fans et peut adapter leurs stocks en conséquence ou lancer des promotions et des actions spécifiques autour des produits les plus populaires. 

Conclusion

Le paysage numérique est en pleine mutation : les lois sur la protection des données deviennent de plus en plus restrictives, les consommateurs sont de plus en plus conscients de leurs données et un monde sans cookies se profile à l’horizon.

Les marques sont donc confrontées à un dilemme : elles doivent collecter des données auprès de leur public car elles ne peuvent plus compter sur les cookies tiers pour les atteindre, mais elles doivent le faire d’une manière conforme et qui n’effraie pas leurs consommateurs, au risque qu’ils ne partagent pas leurs données.

Chez Qualifio, nous pensons que cet équilibre peut être atteint par les marques qui s’engagent avec leur public et apprennent à mieux le connaître, grâce aux données first-party et zero-party. Et que les formats de marketing interactif, tels que les quiz, les sondages, les jeux et les tests de personnalité sont le moyen idéal pour y parvenir, car ils améliorent l’expérience de marque d’un consommateur. En mettant en évidence l’échange de valeur lors du partage de données, les marques augmentent leurs chances de collecter les données de leurs consommateurs.

L’étude d’Elisa a mis en évidence 3 conclusions qui nous confortent dans nos convictions, et qui peuvent aider les marques à comprendre ce que leur public est susceptible de vouloir partager et ce qu’ils vont partager : 

  • 📧 Les consommateurs sont plus réactifs à une communication hautement personnalisée, car ils perçoivent un contrôle sur le processus de divulgation des informations.
  • 🔍 La transparence a un effet direct sur l’intention du consommateur de partager ses données et elle améliore ses intentions comportementales et son engagement. Elle est également étroitement liée à la confiance, et la combinaison des deux permettra aux consommateurs de partager leurs données. 
  • ✔️ Les consommateurs préféreront partager des données sensibles et personnelles s’ils ont le sentiment de les contrôler, alors que s’ils n’ont pas le sentiment de les contrôler, ils ne seront même pas disposés à partager des informations de base.

Tout se résume donc à la façon dont le consommateur perçoit l’expérience avec la marque et l’échange de valeur, et au fait qu’il ait le sentiment d’être dans les bonnes conditions pour partager ses données personnelles. Si les marques parviennent à trouver cet équilibre en offrant un environnement sûr et transparent à leurs consommateurs, elles seront sur la bonne voie pour construire une relation significative avec eux et auront tous les outils en main pour affronter le monde sans cookies.

Arthur Jolly

Cet article a été rédigé en collaboration avec Elisa Kalantarian, dont la thèse « Sous quelles conditions les consommateurs sont-ils prêts à partager leurs données personnelles pour bénéficier de la personnalisation ? » a été rédigée en juin 2021 pour la Solvay Brussels School – Economics & Management et l’Université Libre de Bruxelles.